Un miroir peu flatteur

Prendre conscience que l’on occupe des positions privilégiées au sein des rapports d’oppression entache l’image positive qu’on construit de soi-même en tant qu’actrices solidaires.

Pour un individu situé au sommet de la pyramide sociale, le défi est de taille puisqu’en plus de devoir surmonter la blessure narcissique que représente cette prise de conscience, ce membre privilégié n’a généralement que peu d’expériences personnelles qui lui permettraient de comprendre en quoi consiste l’oppression. Mais le processus n’est pas nécessairement plus facile pour des membres un peu moins privilégiés, par exemple pour une femme blanche lesbienne et de classe moyenne, la tentation est forte de ne prendre en compte que son expérience de l’oppression en oubliant qu’elle détient des privilèges refusés à d’autres. En ce qui concerne les Québécois-e-s blanc-he-s, Chantal Maillé suggère que le principal obstacle à la reconnaissance des privilèges est dû au fait de vivre « dans une culture qui s’est longtemps perçue comme minoritaire et colonisée plutôt que de se définir par référence à son appartenance à la culture occidentale blanche et impérialiste.» -22-

Puisque la reconnaissance de nos privilèges nous renvoie un miroir peu flatteur de nous-même, nous développons diverses réactions pour nous en protéger.

—————————————–

22-Maillé, « Réception de la théorie postcoloniale dans le féminisme québécois », p. 106.